À Montpellier, pendant cette même période, influencé par les idées des courants réformistes – les Franciscains spirituels sous la conduite de Pierre de Jean Olivi –, avec lesquels il commence à être en contact, et poussé par une profonde expérience religieuse, Arnau de Vilanova écrit ses premières œuvres théologiques.
Dès 1297, bien qu’il réside à Montpellier, Arnau devient le médecin de Jacques II puis, après son mariage avec Blanche d’Anjou, il s’occupera également de la santé de cette dernière et de ses enfants. Il devient ensuite conseiller du roi qui le chargera de plusieurs missions. Ainsi, en 1299, il l’envoie à Paris auprès de Philippe le Bel afin de négocier le retour du Val d’Aran. Arnau profite de son séjour à Paris pour diffuser des idées apocalyptiques à la Faculté de théologie ; il y est dénoncé par les théologiens auprès de l’Ordinaire. De ce fait, une procédure inquisitoire est entamée contre lui et Arnau est contraint de passer quelques jours en prison. Il n’est libéré qu’après le paiement d’une importante caution. Les évènements de Paris marqueront les années suivantes de sa vie. En 1301, Arnau arrive à la cour papale d’Anagni. Le pontife Boniface VIII mettra finalement un terme à la procédure inquisitoire : il réprouve l’œuvre d’Arnau, l’arrête et le fait abjurer, mais il rabaisse la gravité des déclarations apocalyptiques arnaldiennes en affirmant qu’il s’agissait de simples spéculations académiques… Il lui conseille alors de se consacrer à la médecine et non à la théologie. En fait, Boniface VIII, qui souffrait de gravelle, portait un grand intérêt aux connaissances médicales d’Arnau. Il devient le médecin principal du pape et le soigne de la gravelle grâce à un traitement qui comprenait un sceau astrologique, qu’il lui donna par écrit dans un opuscule aujourd’hui perdu.
Les évènements de Paris ne sont que les premières escarmouches d’une polémique qui durera jusqu’en 1305. Plusieurs professeurs de Paris réagirent en faveur (tels que Jean Quidort) ou contre (Peire Cros) l’annonce de l’arrivée imminente de l’Antéchrist faite par Arnau. Après les théologiens de Paris, les Dominicains prennent la relève : Bernat de Puigcercós (Gérone, 1302-1303), Joan Vigorós (Marseille, 1304) ou Martin d’Ateca (Barcelone, 1304-1305). Ils échangent avec Arnau toute sorte d’œuvres, des dénonciations ou contre-dénonciations qu’ils transmettent aux autorités ecclésiastiques. Arnau vit alors des années d’agitation, d’inquiétude et de peur. Afin d’éviter d’être dénigré ou que ses affirmations soient déformées, il confesse publiquement sa pensée devant les évêques et les abbés de la Tarraconaise (Lleida, 1303) ou le roi Jacques II (Barcelone, 1305) et présente ses œuvres aux papes (Benoît XI, Clément V). La polémique prend fin (tout du moins provisoirement, elle reprend après le décès d’Arnau) lorsqu’il présente toutes ses œuvres De evangelica veritate écrites jusqu’en 1305 au pape. Clément V réserve au Saint-Siège l’étude et l’examen de ces œuvres. C’est à cette époque que le roi Jacques II prend part en faveur d’Arnau, lorsque l’inquisiteur de Valence, Guillem de Cotlliure, excommunie Gombau de Piles pour possession de livres d’Arnau de Vilanova. Le roi déclare alors qu’il en possède également et qu’il les lit.